Plérin (22) : sous-titre d'un noir et blanc... (2/3)

"Employée comme moyen d'extériorisation d'un souci créateur, [la photographie] est autre chose qu'une simple copie de la nature. Autrement les "bonnes" photos ne seraient pas si rares."  Gisèle Freund, Photographie et société, Paris, 1974.


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     Toutes ces bribes de vies immortalisées en noir et blanc de Robert Doisneau déclenchèrent chez moi la première émotion contemplative propre à l'art. C'était au Musée des Beaux-Arts de Nantes, du temps des vers de Prévert, des jeux de cours d'école et des chamailleries enfantines. Et ce fut encore enivré de joie et conscient d'être un enfant plus abouti que je descendis les hautes marches irrégulières du musée. L'art de la photographie et cette rencontre frontale n'allaient plus me quitter.  

     La photographie ci-dessus me tient à cœur, bien que le lieu ne mobilise pas particulièrement de sentiment affectif de ma part. Je vous replace à Plérin, une commune de Basse-Bretagne nord près de la pointe du Roselier et voisine de Saint-Brieuc. Le ciel était assurément maussade, affichant des nuances de gris fade s'entremêlant avec les teintes bleues éteintes. Basse et lointaine la mer avait seulement laissé un mince chenal derrière elle, des quantités énormes de coquilles saint Jacques ouvertes, et ici et là des déchets anthropiques, notamment de très nombreux funes ainsi qu'une partie de chalut accompagnée de la moitié du fermoir. L'air était mordant pour un mois d'avril d'autant plus qu'une légère brise rafraichissant les corps bien emmitouflés des promeneurs. Au loin, et derrière le quai, un couple ramassait des crustacés sans que je puisse les décrire davantage. 

     En prenant ces trois photographies en rafales, je ne pensais pas du tout en produire une photographie en noir et blanc, je faisais mes premiers pas sans trépied dans le monde de la HDR. Pour faire simple, le principe de la HDR consiste à prendre plusieurs photographies avec différents paramètres de luminosité pour les fusionner par la suite. L'intérêt principal est la conservation sur un pixel de beaucoup plus de données relatives aux teintes par rapport à la piste de lumière choisie, si bien que l'émotion ressentie en appuyant sur le déclencheur de l'appareil se renouvelle presque en visionnant de nouveau cette capture d'un instant terminé. 

     Pourquoi alors évoqué Robert Doisneau, Gisèle Freund avec vous ? Parce que leurs photographies et d'autres tels les portraits saisissants d'August Sander ou de Robert Lebeck... m'ont paradoxalement souvent freiné pour m'autoriser le noir et blanc. Leur style, la beauté de leurs réalisations, l'émotion qu'ils procurent ne peuvent pas être égalé par la grande majorité des photographes amateurs dont je fais partie. D'autant plus que rien n'est plus frustrant pour moi d'espérer un résultat que je ne parviens pas entièrement à atteindre par la suite. Néanmoins ma photographie en noir et blanc d'un quai et de deux embarcations échouées sur la grève à Plérin est la seule aujourd'hui à recueillir quelques grâces à mes yeux. Presque satisfaite, je la partage avec vous.


Portraits du photographe rhénan August Sander.
Précédemment :
ici Plérin : la gardienne du Gouêt (1/3).

A suivre :
Plérin : la maison du phare (3/3).

H.M

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