1788 : ouverture du théâtre de la Révolution.


        En 1788, alors en pleine transformation, Nantes gomme progressivement les signes de son passé médiéval. A la place, surgit un cadre urbain néo-classique marqué par un retour aux formes géométriques pures de l'Antiquité. Le jour de Pâques, le grand théâtre de Nantes ouvre ses portes. Nouvellement construit sous l'impulsion de Jean-Joseph Graslin, receveur général des fermes du roi à Nantes et sur les plans de l'architecture nantais Mathurin Crucy (article complet ici). Temple laïc de la culture sur le coteau du Bouvet, il domine le quartier commerçant de la Fosse à la manière de la cathédrale sur le quartier aristocratique des Cours. Dans l'hémicycle, l'agronome anglais Arthur Young y côtoie une foule enthousiaste venue applaudir la sublime Mademoiselle Saint-Huberti. Il admire ce monument :

" La façade a un superbe portique de huit colonnes corinthiennes fort élégantes ; quatre autres en dedans séparent ce portique d'un vestibule majestueux. A l'intérieur, ce n'est qu'or et peinture, le coup d’œil d'entrée me frappe grandement "



        Depuis midi déjà, les spectateurs se massaient, tant les places étaient disputées. Au programme : Didon Ariane, Phèdre ou Armide. Symbole de la prospérité nantaise, ce nouveau théâtre est un des rendez-vous obligés de ces Messieurs du Commerce. Négriers certes, mais pétris de culture classique et membres de sociétés de pensée.

Le " théâtre de la Révolution ", lors des travaux de rénovation de 2012.
Reproduction et modification interdites sans autorisation - Tous droits réservés - All rights reserved (art L.111-1 et L.123-1 du code de la propriété intellectuelle).


          Quelques semaines plus tard, en avril, un différend oppose la municipalité à Versailles à cause de deux loges d'honneur, l'une et l'autre réservées pour le roi et la reine. En leur absence, elles revenaient respectivement au gouverneur de la ville et à l'intendant de la province de Bretagne. Or ce dernier résidant presque en permanence à Versailles, les échevins (maire, officiers municipaux...) trouvent tout naturel de l'utiliser. D'autant plus, que les négociants ont financé avec leurs deniers ce théâtre neuf. Mais Versailles ne l'entend pas de cette oreille et sous la menace, la municipalité doit s'incliner. Simple anecdote ? Pas si sûr... . L'intransigeance de la cour parisienne est ressentie comme in camouflet par la bourgeoisie nantaise.



Épilogue :

        Dans la tourmente de la Révolution, les directeurs qui louaient le théâtre pour 200.000 livres par an font faillite. Et le 24 août 1796 (7 fructidor de l'an IV) sonne le coup d'arrêt ; une bougie s'enflamme dans les décors, le feu se propage à l'ensemble du bâtiment. Il brûle pendant 3 journées. Sept personnes y laissent la vie. Le grand théâtre de la Révolution aura diverti seulement pendant huit années. Il ré-ouvre en 1813 avec l'appui de l'empereur Napoléon Ier. 


Pour en savoir plus :
ici, Vue panoramique du Théâtre Graslin.
DUPUY (R.), La Bretagne sous la Révolution et l'Empire (1789-1815), Rennes, 2004, p 133.
PERON (A.), Nantes et la Révolution, La mémoire des lieux, Quimper, Editions Ressac, Quimper, 1988.


La Place Graslin en octobre 2012, avant qu'elle ne soit totalement piétonne.
Reproduction et modification interdites sans autorisation - Tous droits réservés - All rights reserved (art L.111-1 et L.123-1 du code de la propriété intellectuelle).
Les chapiteaux corinthiens, en arrière plan : les vitres en cours de démontage.
Reproduction et modification interdites sans autorisation - Tous droits réservés - All rights reserved (art L.111-1 et L.123-1 du code de la propriété intellectuelle).

" Louis XVI le Bienfaisant ".
Reproduction et modification interdites sans autorisation - Tous droits réservés - All rights reserved (art L.111-1 et L.123-1 du code de la propriété intellectuelle).
" Jeu de symétrie ".
Reproduction et modification interdites sans autorisation - Tous droits réservés - All rights reserved (art L.111-1 et L.123-1 du code de la propriété intellectuelle).




Commentaires