1987 : à Nantes, l'entrepôt Loiret et Haëntjens prend feu.


        C'est une journée gravée dans les mémoires de milliers d'habitants de Nantes et de l'agglomération. Une journée où les vents ont changé le cours de l'Histoire. Le 29 octobre 1987, à 9 h 30, un incendie se déclare dans un dépôt d'engrais de l'entreprise Loiret et Haëntjens (Chantenay, Nantes). Une heure après, une cellule de crise est lancée à la préfecture, avec un dispositif d'un millier de sapeurs-pompiers, policiers, gendarmes, membres des services d'hygiène... Les radios et télévisions locales diffusent des messages pour les habitants de Saint-Herblain, Indre, Couëron, Bouguenais, La Montagne, Saint-Jean-de-Boiseau, Le Pellerin, Brains. Policiers et gendarmes passent dans les rues, frappent aux portes pour que les habitants se calfeutrent. « Je me souviens, on mettait des serpillières en bas des portes de la maison », explique une Herblinoise. Tous ne sont pas prévenus. « On travaillait en bas de Saint-Herblain et on n'était pas au courant. C'est un pompier volontaire qui nous a prévenus. Je suis alors cherché mes filles chez la nourrice et à l'école », se remémore un autre habitant. 


       A midi, la cellule de crise ne connaît toujours pas la nature des émanations et le taux de toxicité. L'inquiétude règne. On scrute ce nuage de peroxyde d'azote et de chlore qui est poussé vers l'ouest par un vent léger. À 13 h 30, l'évacuation est annoncée pour 6 communes. Des bus et des véhicules militaires sont réquisitionnés. A 14 h 10, les journalistes reçoivent les premières informations officielles de la préfecture : « Si le nuage retombe, nous ne voulons pas courir le risque de laisser des gens sur place [...] Ce gaz peut poser des problèmes respiratoires sérieux ». Le plan Orsec est déclenché. La gendarmerie balise des itinéraires à la sortie des entreprises pour diriger les voitures. La cellule de crise est toujours en ébullition, les intervenants sur le terrain aussi. À 16 h 10, l'incendie est circonscrit et la préfecture indique « qu'il n'y a plus d'émanations toxiques provenant du site ». Vers la Beaujoire et les communes désignées, les évacuations continuent. En car ou avec sa voiture personnelle. Chez des amis, de la famille, ou dans des sites réquisitionnés. Tout le monde écoute la radio. À 20 h 45, le préfet annonce que tout danger de pollution est écarté. Les habitants évacués peuvent rentrer chez eux. Le pire a été évité.

Tréman (C.), Il y a vingt ans, un nuage toxique inquiétant..., Presse Océan, 26/10/2007.


Loiret et Haëntjens est une entreprise nantaise créée en 1871 par les natifs de la ville Stanislas Loiret et Charles Haëntjens [nom qui n'est pas sans rappeler le récent article sur la mixité ethnique des populations bretonnes]. Encore en activité, elle est spécialisée dans l’importation et le négoce de commodités agricoles et de produits alimentaires destinés à une clientèle professionnelle : industriels, conditionneurs, grossistes et distributeurs.

Pour en savoir plus :

ici : Gilbert (C.), Au dessus du nuage. Nantes, 29-10-87 : analyse d'une situation de crise, IN Les Annales de la recherche urbaine, n° 40, pp 25-36, 1988.


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